Je lis souvent des textes écrits par mes artistes préférés, comme Paul Klee, Kandinsky ou Van Gogh. La vie d'un peintre est souvent solitaire et ces textes m'aident continuellement dans mon developpement sur le plan artistique. Et naturellement j'ai envie de répondre, dans ce dialogue. Voici quelques textes accumulés dans le temps.
Trajectoires : (Formation et Vagabondage)
Et Qu'est-ce que La Peinture
Quelques Pistes (le pourquoi)
Textes sur la Peinture
Un peu plus sur le parcours
Qu'est-ce que la peinture?
Un moyen de laisser des traces pour voir où on a été, pour mieux savoir où l’on va, peut-être. Mais comme nous sommes sur un chemin, et que tout ce que nous faisons a son importance, c’est essentiel pour moi de choisir avec soin les matériaux que j’utilise. La peinture est plus que l’image que l’œil perçoit et qui est ensuite analysée par le mental. Il y a des interactions plus subtiles. Le corps entier est capable de percevoir. Ceci explique pourquoi on ressent une attraction pour quelqu’un ou quelque chose. Ou pourquoi dans certains environnements nous sommes mal à l’aise ou au contraire on ressent un bien-être. Comme le monde matériel est composé de vibrations, la structure même et la composition et surface d’une œuvre influencent les interactions que nous avons avec elle.
Je ne cherche pas à parler de la société actuelle ou à faire un travail sociologique. Je préfère créer des œuvres qui donneront quelque chose à l’observateur. Que cela soit une pensée philosophique, un sentiment de calme, ou simplement un peu d’oxygène. Je crois, comme Beuys, que l’art a une mission de guérison, autant pour l’observateur que pour l’artiste.
Sur les techniques utilisées
Après avoir essayé toutes sortes de techniques traditionnelles, à l’huile, à l’acrylique, à l’aquarelle, etc., j’ai fini par développer ma propre « cuisine », selon les besoins du moment. Le plus souvent j’utilise le papier de différent façons (en feuille, tissé, en pâte …) avec des pigments, des cendres, des fibres végétaux et des résines ou autres liants comme la cire d’abeille sur des supports variés (papier, bois, toile de lin, ou une combinaison des trois). J’utilise aussi la technique de l’encaustique qui consiste en pigments mélangés avec la résine de Damar et la cire d’abeille, appliqués à chaud sur des supports. Parfois tout simplement l’encre de Chine et un pinceau sur papier ou de l’aquarelle…
Quand l’espace le permet je peux faire des installations adaptées, incorporant des éléments tels les « oiseaux-bananes » et/ou des textes et autres objets. Pour voir la série des oiseaux-bananes je vous invite d’aller voir mon site à la page :
http://lin.schmidt.free.fr/fr/html/banane.html
Quelques Pistes
J’aime bien laisser aux gens la liberté d’interprétation. L’interaction entre la toile et le regard du spectateur avec ses impressions, associations et spéculations sur le sens est aussi valable, a autant de vérité que le dialogue qui a lieu entre le tableau et moi pendant son développement. La toile a sa propre existence et doit tenir toute seule. Mais j’aimerais essayer d’en parler, peut-être simplement donner quelques pistes...
Déjà on peut voir des formes géométriques : la géométrie raconte une histoire, les formes émettent une vibration. Mais il faut aussi mentionner une double influence de la pensée chinoise (surtout taoïste) et les cultures Navajo et Hopi des Indiens du sud-ouest des Etats-Unis. Je trouve qu’il y a des parallèles, des recoupements surtout dans certains aspects de la symbolique et les images utilisées pour parler du monde.
J’utilise la peinture comme moyen d’explorer ces domaines avec un langage non verbal, ce qui me permet plus facilement d’associer l’irrationnel et le rationnel. Voyons quelques exemples...
Si je prends le carré, par exemple, il est composé de quatre côtés plats, avec angle de 90°. Perpendiculaire donc il y a déjà la spatialité (impliquée) par les bords verticaux et horizontaux. Sur l’horizon il y a l’homme debout. Debout entre ciel et terre (vision taoïste de la place de l’homme).
Le carré délimite aussi un espace, un terrain. Posé à plat c’est une carte. Pour les chinois d’ailleurs le carré représente la terre et ses points cardinaux. Le carré évoque la stabilité, la matérialité.
Parfois dans d’autres peintures c’est une fenêtre ou une porte, un point de passage.
Voyons le cercle. Dans la pensée chinoise le cercle représente le ciel, le dôme céleste. Le cercle évoque des cycles donc on retrouve la notion du temps et du mouvement. Exprimé par le cercle aussi, la globalité et l’unité. Le cercle en tant qu’ensemble est un point, le un. Si l’on se positionne au centre et tourne autour il est 360°, le tout.
Ou prenons la spirale, un cercle en mouvement, qui prend en compte la transformation. Il y a le cycle des quatre saisons qui se suivent par exemple, mais à chaque passage on ne se retrouve pas tout à fait au même point. La spirale peut représenter aussi l’énergie, le potentiel d’énergie comme dans un ressort, le mouvement ou la trace d’un mouvement...
J’aimerais évoquer un autre aspect de mon travail, les matières utilisées. Papier, tiges d’achillée ou bambou, terres et pigments, cire d’abeilles... Elles apportent à la fois une présence tactile et émettrice et une référence symbolique. J’accumule un besoin de me nourrir (ou simplement me rééquilibrer) par les sensations tactiles, le contact avec le bois ou le papier, aussi le processus inhérent à la fabrication, que ce soit de tisser, d’attacher des éléments ensemble, d’écrire ou de simplement reposer le regard sur une surface non régulière. Les éléments apportent leur pouvoir guérisseur...
Lin Schmidt (2002)
Un peu plus sur le parcours
1970/74
Études supérieures et Diplôme en Arts Plastiques et Psychologie.
Forte influence des œuvres de Jackson Pollack, Georgia O'Keefe, Robert Rauschenberg, et Jasper Johns aux USA, puis émotion profonde face à Giotto et les primitifs au Louvre.
1975/76
Voyages aux USA et en Europe en vélo. Visites des grands musées de l’Europe. Influence du Nord : Memling, Holbein, Cranach, Vermeer
1977/79
Retour à Chicago et travail au MCA (Museum of Contemporary Art) – Rencontres avec différents artistes: Robert Mangold, Robert Ryman, Phil Berkman...
Participation à une galerie coopérative à Chicago.
1979/80
Séjour à Bordeaux pour étudier le chinois et pour continuer des recherches sur le "Yi Jing". Rencontre du peintre R. Boutiq avec qui elle s'installe à Tarbes pour se consacrer à la peinture.
1983
Première série de peintures sur le "Yi Jing".
Début d'apprentissage du tai chi chuan, qui va influencer son travail.
1986-87
Evolution vers les structures - dialogue peinture/sculpture. Fabrication de la peinture à partir des liants (huile et autres).
Commence à enseigner le tai chi chuan. (art martial chinois)
1991/93
Incorporation du texte comme matière : à la fois comme texture et présence dans la signification, la poésie de Li Po, Ezra Pound, T.S. Eliot...
1995
L’utilisation de plus en plus prononcée de l'encaustique.
1995/98 /2002
Commence le travail sur des thèmes : messager, porte, fenêtre, spirale…
Commence à développer le thème de "bu", ou la consultation de l'oracle, et continuation sur les autres thèmes.
2002/03
Elle accompagne R. Boutiq, peintre et âme sœur, en fin de vie. Bouleversement total.
2006/07
Retour progressif à la peinture.
2008
Reprise des activités de création.
depuis 2008
Recherches en atelier : pigments, résine acrylique, papiers, cendres, silex, raffinage de la cire d'abeilles et peinture à l'encaustique.
Parallèlement s’intéresse à la philosophie taoiste, le Yi Jing, des poètes chinois ainsi que des cultures Amer-Indiennes (surtout Navajo et Hopi). commence à pratiquer le tai chi chuan, (et l’enseigne depuis 1987).
Travaille sur une synthèse entre tradition et modernité, est et ouest, geste et méditation.
Trajectoires : (Formation et Vagabondage)
Depuis longtemps, depuis toujours, observer.
De ma plus tendre jeunesse l’observation m’a beaucoup appris. L’observation des motifs variés dans le carrelage chez ma grand-mère ou le grain dans le bois de certaines portes ou encore couchée sous l’arbre, le ciel vu à travers les feuilles doucement agitées par un vent d’été, tous ces instants m’ont nourrie.
Après vint la contemplation des reproductions des premiers artistes préférés puis la découverte en “face à face” avec l’œuvre. Les influences étaient multiples. A Chicago d’abord de Picasso et Lautrec à Miró, Motherwell et Rothko, puis plus tard en Europe je fus éblouie par Giotto, Fra Angelico, Vermeer...
De retour à Chicago j’ai continué à observer. (En tant que gardienne au musée d’art contemporain j’avais le temps! Cela m’a apporté bien plus que les études et le diplôme en arts plastiques.)
Regarder la même expo un mois durant m’a énormément appris. Parfois les premières impressions sont justes, parfois on tombe complètement à côté. Qu’est-ce qui fait qu’une œuvre reste profonde? C’était l’époque du minimalisme. Un minimaliste pouvait m’agacer ou m’ennuyer après un certain temps, alors qu’un autre continuait à me parler, me questionner. Ce n’est donc pas une simple question de style, d’école ni même de sujet, mais plutôt de vibration. Peut-être même pour chaque personne la perception est unique, malgré notre fond universel. En tout cas certaines expos restaient anecdotiques alors que d’autres amusaient avec ironie. Mais les meilleures pour moi sont celles de la guérison, soit par un apport de mieux-être ou par la confrontation avec soi.
Les matériaux contiennent déjà leur vibration propre. S’ajoute encore les associations que l’on apporte par analogie :
la terre / l’argile, avec l’apport de l’eau l’origine de la vie...
l’achillée / plante médicinale utilisée dans la divination avec le Yi King, un des plus anciens livres du monde
les pigments ou cendres / souvent produits par le feu, témoins de transformation
la cire d’abeilles / élément protecteur et harmonisant
la résine / élément tantôt végétal tantôt minéral, durcisseur
l’écriture / concrétisation de l’idée en graphisme qui la rend accessible aux autres
Le processus du tissage et entrelacement, d’observation, d’action et repos, le choix de matières, le choix de textes, de couleurs, le passage par l’eau des lavis et le feu de l’encaustique. Tous laissent les traces de leur passage.
Puis de nouveau le temps pour l’observation.
Lin Schmidt (2002)
Expérimentations entre le bananier et l'oiseau-banane !